GREFFIER - Fonction et responsabilité
INDEX
Actes, 31, 41, 56
– de l'état civil, 33 s.
– nuls, 47
Action récursoire, 17 s.
Agent judiciaire du Trésor, 10
Commis-greffier, 35, 39
Compétence, 9, 34, 38
Copies, 4, 49
Déclinatoire de compétence, 8
Délivrance de copies, 4, 49
Dépôt de dessins et modèles, 55
Discipline, 20, 36
Documents, 51
Dommages-intérêts, 36, 40, 48 s.
Emoluments, 48
Enregistrement, 4, 31 s., 56
Etat civil, 33 s.
Faute, 41 s.
– disciplinaire, 20, 36
– personnelle, 12 s., 29 s.
– de service, 6 s., 17 s.
Fonctionnaire, 4 s.
Fonctionnarisation des greffes, 1 s.
Fonctions, 1, 4, 35
Greffier, 1 s.
– titulaire de charge, 3
– de tribunal de commerce, 3, 35
Jugement, 41 s., 56
Mise en débet, 23 s.
Objets déposés, 4, 28, 51, 54
Officier de l'état civil, 33 s.
– public et ministériel, 3, 35
Pièces à conviction, 4, 28 s., 51
Préjudice, 13, 15, 36, 40
Procédure annulée, 47
Procès-verbaux, 43
Régisseur d'avances et de recettes, 4, 21 s.
Registres, 4, 45 s.
– du commerce et des sociétés, 46 s.
– des ventes et des nantissements de fonds de commerce, 45
Responsabilité civile, 4 s., 37 s.
Sociétés de greffiers des tribunaux de commerce, 36
I .
– GREFFIERS EN CHEF ET GREFFIERS
DES COURS ET TRIBUNAUX ET DES CONSEILS DE PRUD'HOMMES
A .
– Introduction
1. – Fonctionnarisation des greffes. - La loi n° 65-1002
du 30 novembre 1965 (JO 2 déc. 1965 : JCP65, III, 31556)
portant réforme des greffes des juridictions civiles et pénales, codifiée
dans le Code de l'organisation judiciaire (, art. L. 811-1) et entrée en vigueur
le 1er décembre 1967, a décidé que désormais le service des secrétariats-greffes
de la Cour de cassation, des cours d'appel, des tribunaux de grande instance,
des tribunaux d'instance et des tribunaux de police était assuré par des
fonctionnaires de l'Etat.
2. – L'article L. 512-14 de la loi n° 79-44 du 18
janvier 1979 (JO 19 janv. 1979), codifié dans le Code de l'organisation
judiciaire (, art. L. 831-1) et entré en vigueur le 1er janvier 1979, à l'exception
des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle dans lesquels
il n'a été mis en application que le 15 janvier 1983, a décidé que le service
des secrétariats-greffes des conseils de prud'hommes était assuré par
des fonctionnaires de l'Etat.
3. – Ainsi, aujourd'hui, seuls les greffes des
tribunaux de commerce sont dirigés par des greffiers titulaires de
leur charge et qui sont des officiers publics et ministériels (COJ, art. L. 821-1).
B .
– Responsabilité civile du greffier
4. – Le greffier en chef et le greffier sont soumis
au régime applicable à la responsabilité des fonctionnaires.
Toutefois, ces fonctionnaires de justice possèdent des attributions particulières susceptibles de leur faire encourir, dans leur exercice, une responsabilité civile exhorbitante du droit commun.
C'est ainsi que le greffier en chef, aux termes des articles
R. 812-2 et R. 814-2 du Code de l'organisation judiciaire est dépositaire
des minutes et archives dont il délivre expéditions et copies ; il assure
la garde des scellés et pièces déposées au greffe.
Les Codes de procédure civile et pénale lui confient la charge de tenir divers registres publics, de dresser procès-verbal des déclarations qui lui sont faites.
Le Code général des impôts lui impose diverses obligations,
en particulier, celle de faire enregistrer certains jugements et actes (CGI, art. 635 et 853).
Il est dépositaire d'un exemplaire des registres de l'état
civil (C. civ.,
art. 53 et D. n° 62-921, 3 août 1962 modifié, art. 1er).
Le greffier en chef peut déléguer partie de ses attributions
aux agents du secrétariat-greffe, notamment aux greffiers (COJ, art. R. 812-6) qui ont eux-mêmes
leurs propres attributions (art. R. 812-11);
mais il n'est dégagé d'aucune des responsabilités qui lui incombent par la
responsabilité propre de ses subordonnés
(L. n° 83-634, 13 juill. 1983, portant droits et obligations des
fonctionnaires, art. 28, al. 2).
Par simplification dans les commentaires qui suivent les greffiers en chef et les greffiers sont désignés sous le nom générique de greffier.
5. – Le greffier participe au service public de la justice. Or, aux termes de l'article L. 781-1 du Code de l'organisation judiciaire, l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux de ce service. Le même texte ajoute que cette responsabilité de l'Etat n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice.
Lorsque la faute ayant causé le dommage n'est pas une faute de service mais une faute personnelle, celui qui l'a commise est responsable. Cependant, la responsabilité du magistrat ne peut être engagée, même en ce cas, par la victime du préjudice contre lui ; le recours ne peut être dirigé que contre l'Etat qui dispose ensuite d'une action récursoire (Cf. Ord. n° 58-1270, 22 déc. 1958 relative au statut de la magistrature, art. 11-1 et Paris, 1re ch. A, 19 juin 1991 : Gaz. Pal. 10 oct. 1991). Par contre, le greffier responsable d'une faute personnelle peut être attrait devant un tribunal par la personne lésée.
1 ° Responsabilité civile à l'égard des particuliers
6. – Depuis l'arrêt Pelletier du 30 juillet 1873 (D.
74, 305) le Tribunal des conflits a établi une théorie de la responsabilité
civile du fonctionnaire qui repose sur la distinction entre la faute de
service et la faute personnelle.
7. – La faute de service est celle qui ne se détache pas de l'exercice de la fonction publique ; les erreurs, les imprudences, les négligences, le défaut de surveillance etc., commis dans l'exercice des fonctions sans intention coupable, sont des fautes de service. Et en cas de faute de service, le particulier qui en est victime ne peut pas demander réparation de son préjudice au fonctionnaire ; il ne peut que s'adresser à l'Etat et, éventuellement l'attraire devant les tribunaux administratifs ou les tribunaux de l'ordre judiciaire si la responsabilité du service de la justice est en cause.
8. – Lorsqu'un particulier traduit un fonctionnaire
devant un tribunal judiciaire le préfet doit déposer un déclinatoire de
compétence par l'intermédiaire du procureur de la République dans lequel
il indique la disposition législative qui donne compétence aux tribunaux administratifs (Ord. 1er juin 1828, modif.,
art. 6).Si le déclinatoire est rejeté, le tribunal s'estimant compétent,
le préfet élève le conflit,c'est-à-dire qu'il dépose au greffe son
arrêté afin qu'il soit sursis au jugement de l'affaire
et le Tribunal des conflits est saisi par l'intermédiaire du garde des sceaux
(art. 8 à 15). Le Tribunal des conflits décide s'il y a ou non
faute de service et en conséquence quel est le tribunal compétent.
9. – Cependant, lorsque la faute a été commise par un fonctionnaire de justice, le préfet ne peut déposer un déclinatoire de compétence. En effet la Cour de cassation a décidé (arrêt Giry, Cass. 2e civ., 23 nov. 1956 : Bull. civ. II, n. 626) que le contentieux de la responsabilité de l'Etat pour dommages causés par le fonctionnement des services judiciaires est, en raison de la séparation des pouvoirs, jugé par les tribunaux de l'ordre judiciaire. Et cette jurisprudence confirmée par les juridictions administratives (TA Caen 20 fév. 1958 : D. 1959, 40) ne s'applique pas seulement à l'exercice de la fonction juridictionnelle, il convient d'y inclure les actes d'administration judiciaire émanant des autorités judiciaires et les actes administratifs pris par les autorités administratives collaborant à ce service (TGI Marseille, 1re ch., 1er oct. 1980). En effet, le service de la justice comprend non seulement les magistrats, mais également les fonctionnaires.
C'est en vertu de cette jurisprudence qu'il a été jugé que
les litiges nés de la communication ou du refus de communication de jugements,
ordonnances et arrêts rendus par les juridictions judiciaires intéressent le
fonctionnement du service public de la justice et sont de la compétence
judiciaire (CE 27 juill. 1984, sect., Assoc.
SOS Défense c. Cour de cassation, deux arrêts : Rec. Cons. d'Et.
p. 284 et 285).
10. – Lorsqu'un particulier attrait un greffier devant
le tribunal de l'ordre judiciaire en invoquant une faute engageant sa responsabilité
celui-ci doit en informer le garde des sceaux, ministre de la justice, afin
que ce dernier provoque l'intervention de l'Etat par son représentant,
l'agent judiciaire du Trésor (L. n° 55-366, 3 avril 1955, art. 38 : JO
6 avril 1955).
11. – Le tribunal devra dire alors si la faute reprochée au fonctionnaire est une faute de service ou une faute personnelle.
12. – La faute personnelle suppose une intention maligne ; par exemple, constitue une faute personnelle les voies de fait (Trib. conflits 14 janv. 1980, dame Techery, Paon : Rec. Cons. d'Et., p. 504),une acte vexatoire inspiré par un dessein malicieux ou sectaire (Trib. conflits 27 mars 1952, dame de la Murette : Rec. Cons. d'Et., p. 626. – CE 18 nov. 1949, Carlier : Rec. Cons. d'Et., p. 490) un vol (TA Nancy, 18 avril 1956, Romain : Rec. Cons. d'Et., p. 533). Elle est constituée par un acte dommageable effectué dans un but malveillant ou une intention de nuire.
La faute personnelle est également constituée lorsque l'acte
est dépourvu de tout lien avec le service
(CE 27 fév. 1981, Cne de Chonville-Malaumont : Rec.
Cons. d'Et., p. 116) ou lorsque la faute est d'une gravité dépassant la
moyenne des fautes auxquelles on peut s'attendre (Trib. conflits 9
juill. 1953 : JCP53, II, 7797).
Ainsi elle se détache du service, de l'exercice de la fonction car elle y est étrangère.
13. – Si le tribunal estime qu'il s'agit d'une faute personnelle, il condamne le greffier à réparer le dommage qu'il a causé sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil.
14. – Au contraire, s'il déclare que la faute du greffier est une faute de service, il condamne l'Etat. L'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires pose en effet le principe que lorsqu'un fonctionnaire est poursuivi par un tiers pour faute de service, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions n'est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations qu'il encourt.
15. – Cependant qu'il s'agisse d'une faute personnelle
ou d'une faute du service, la jurisprudence exige que la faute
soit lourde, c'est-à-dire que les circonstances conduisent à la considérer
comme inexcusable. La victime doit donc établir à la fois que le service de
la justice n'a pas fonctionné de façon normale, que ce mauvais fonctionnement
est dû à une déficience inadmissible, qu'elle a subi un dommage et qu'il existe
un lien de causalité directe entre ce dommage et la faute
(TGI Marseille 1er oct. 1980, précité. – V. aussi
Paris, 1re ch. A, 21 juin 1989 : Gaz. Pal. 1989, 2, 944).
16. – Au cas où il ne serait pas intervenu dans l'instance
ou n'aurait pas été mis en cause, l'Etat doit, par application de l'article
11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, dans la mesure où une
faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions ne lui est pas
imputable, couvrir le fonctionnaire des condamnations civiles prononcées contre
lui (CE 19 fév. 1954, Delaprée
: Rec. Cons. d'Et., p. 117. – 26 avril 1963, Centre hospitalier Besançon :
Rec. Cons. d'Et., p. 242. – 4 nov. 1970, Ville d'Arcachon : Rec. Cons. d'Et.,
p. 633).
2 ° Responsabilité civile à l'égard de l'Administration
17. – En cas de faute du service reconnue par une
juridiction, l'Etat condamné à réparer le dommage causé par le fonctionnaire,
ne possède pas d'action récursoire contre celui-ci. Le principe dégagé par
la jurisprudence du Conseil d'Etat est la non responsabilité du fonctionnaire
vis-à-vis de l'administration (CE 28 mars 1924, Poursines
: Rec. Cons. d'Et., p. 357. – 20 juin 1947, Caisse municipale de crédit de
Strasbourg : Rec. Cons. d'Et., p. 275).
18. – Par contre, en cas de faute personnelle détachable
du service,l'Etat peut exercer son action récursoire
contre le fonctionnaire (TA Nancy 18 avril 1956, Romain : Rec. Cons. d'Et.,
p. 533. – CE 22 mars 1957, Jeannier : Rec. Cons. d'Et., p. 196. – 15 mai 1981, Kessler : Rec. Cons. d'Et., p. 222).
19. – Dans le cas où le dommage a été causé à un tiers
par les effets conjugués de la faute du service public et de la faute
personnelle d'un agent de ce service, la responsabilité est partagée
et le recours de l'Etat contre ce fonctionnaire est proportionné à
sa part de responsabilité (CE 28
juill. 1951, Delville : Rec. Cons. d'Et., p. 465).
20. – Si la faute de service n'entraîne pas, en principe, de sanction pécuniaire contre le greffier, elle peut constituer une faute disciplinaire et servir de base à une poursuite disciplinaire, par application des dispositions de l'article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée.
3 ° Responsabilité civile du régisseur d'avances et de recettes
21. – Aux termes des articles R. 814-1 et R. 814-2
du Code de l'organisation judiciaire (et R. 512-35 du Code du travail en
ce qui concerne les conseils de prud'hommes), il est institué auprès de
chaque secrétariat-greffe une régie de recettes et une régie d'avances
fonctionnant dans les conditions prévues par les décrets n. 64-486 du 28 mai
1964 (JO 3 juin 1964) et n. 66-850 du 15 novembre 1966 (JO 19 nov.
1966).Les attributions de régisseurs sont confiées à un fonctionnaire
du secrétariat-greffe, autre que le chef de ce service ; toutefois elles peuvent
exceptionnellement être confiées au chef du secrétariat-greffe, lorsque le
secrétariat-greffe qu'il dirige figure sur une liste dressée par arrêté du garde des sceaux (COJ, art. R. 814-2 modifié D. n° 83-454,
2 juin 1983 : JO 10 juin 1983).
22. – Le régisseur d'avances et de recettes est un fonctionnaire du greffe et en cette qualité il encourt les mêmes responsabilités pour faute que les autres agents du greffe et examinées ci-dessus. Mais en sa qualité de régisseur d'avances et de recettes à qui un comptable du Trésor lui est assigné, en vertu des dispositions du décret n° 66-850 du 15 novembre 1966 (, art. 1 à 4) la responsabilité du régisseur d'avances et de recettes est engagée à l'égard de l'Etat sans qu'il y ait lieu de distinguer entre la faute de service et la faute personnelle, il est responsable personnellement et pécuniairement de tout manquant soit qu'une recette n'a pas été recouvrée, soit qu'une dépense a été irrégulièrement payée, soit qu'il a reçu un faux billet de banque, soit qu'une erreur de caisse a été constatée, soit encore que l'administration a dû payer une indemnité à un autre organisme ou à un tiers. Il est même responsable en cas de vol de numéraire commis à son préjudice, ce qui constitue une responsabilité sans faute.
Le régisseur d'avances et de recettes est responsable non seulement des opérations qu'il a exécutées personnellement, mais également de celles exécutées par les agents placés sous ses ordres.
23. – La procédure par laquelle le régisseur d'avances
et de recettes est déclaré responsable vis-à-vis de l'Etat et tenu de lui
payer la somme mise à sa charge est la mise en débet.
24. – Elle débute par un ordre de versement au Trésor décerné à l'encontre du fonctionnaire par l'ordonnateur principal sur avis du comptable assignataire. Si le régisseur d'avances et de recettes ne verse pas la somme réclamée, un arrêté de débet est pris contre lui par le Ministre de l'économie et des finances.
25. – Sur sa demande l'administration peut lui accorder
une remise totale ou partielle (art. 5 à 12).
En outre, la responsabilité du comptable du Trésor assignataire peut être mise en jeu et le débet mis à sa charge s'il a commis l'une des fautes dont la liste figure à l'article 12 du décret précité du 15 novembre 1966 ; le régisseur en est déchargé.
26. – Pour garantir l'Etat contre les risques que les régisseurs d'avances et de recettes lui font encourir, l'article 4 du décret du 28 mai 1964 oblige celui-ci à fournir un cautionnement ou à s'affilier à une association de cautionnement mutuel qui s'engage à rembourser à l'Etat les sommes dont le régisseur d'avances et de recettes serait rendu redevable ; cependant cette association se retourne contre le régisseur d'avances et de recettes pécuniairement responsable.
27. – Le régisseur d'avances et de recettes peut se garantir contre ce risque en contractant une assurance.
4 ° Responsabilité en qualité de dépositaire des pièces à conviction
28. – Aux termes de l'article R. 812-3 du Code de
l'organisation judiciaire le greffier en chef a, sous le contrôle des chefs
de la juridiction, la garde des scellés et de toutes sommes et pièces déposées
au greffe.
29. – Cependant sa responsabilité civile en ce domaine
est celle du fonctionnaire telle que précisée supra n.
4 à 15. Notamment il ne peut être déclaré pécuniairement responsable
qu'en cas de faute personnelle détachable du service.
30. – Par arrêt du 27 octobre 1981 (non publié), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a décidé qu'un tribunal correctionnel ne peut,sur la base de l'article 478 du Code de procédure pénale seul, mettre en cause la responsabilité personnelle pécuniaire du greffier en chef du tribunal, fonctionnaire d'Etat, chargé en tant que tel, selon les dispositions des articles L. 811- 1 et R. 812-3 du Code de l'organisation judiciaire de la garde des scellés et de toutes sommes déposées au greffe.
5 ° Responsabilité en matière d'enregistrement des actes et
décisions judiciaires
31. – Le greffier en chef, fonctionnaire d'Etat, est
tenu aux mêmes obligations et encourt la même responsabilité que les
préfets ainsi que les maires en ce qui concerne les fautes commises en
matière d'enregistrement de jugements ou d'actes.
32. – Lorsqu'au mépris des dispositions de l'article
1840-C du Code général des impôts ces fonctionnaires n'ont pas requis la
formalité de l'enregistrement, dans le délai prescrit par le Code général
des impôts, des actes pour lesquels les parties ont consigné entre leurs mains
et en temps utile le montant des droits simples, ou lorsqu'ils n'ont pas,
en l'absence de consignation,remis au comptable des impôts, ainsi que
le leur prescrit l'article 1840-D, un extrait de l'acte dans la décade qui
suit l'expiration du délai d'enregistrement, l'administration à laquelle appartiennent
ces fonctionnaires se trouve débitrice, vis-à-vis du Trésor, des droits et
pénalités exigibles. Toutefois, l'administration peut se retourner contre
les parties pour la récupération des droits simples, et pour les pénalités
contre ses fonctionnaires mais seulement s'il y a eu de leur part faute personnelle
telle que la conçoit la jurisprudence du Conseil d'Etat (Circ. comptab.
publ. 12 mars 1951 : BOI 56 45. – Dict. enreg.
V° Acte administratif, n. 141).
6 ° Responsabilité en qualité de dépositaire des registres
de l'état civil
33. – Le greffier est officier public en sa qualité de dépositaire d'un exemplaire des actes de l'état civil. Il assume en cette qualité, la même responsabilité que l'officier d'état civil selon les dispositions des articles 51 et 52 du Code civil ainsi libellés :
Art. 51. – Tout dépositaire des registres sera civilement responsable des altérations qui y surviendront, sauf son recours, s'il y a lieu, contre les auteurs desdites altérations.
Art. 52. – Toute altération, tout faux dans les actes de l'état civil, toute inscription de ces actes faite sur une feuille volante et autrement que sur les registres à ce destinés, donneront lieu aux dommages-intérêts des parties, sans préjudice des peines portées au Code pénal.
34. – Après avoir longtemps décidé que la responsabilité
des officiers de l'état civil avait un caractère strictement personnel
(Cf. Cass. req. 15 juin 1990 : DP 1911,
1, 113. – Paris 10 mai 1929 : DH 1929, 418) la jurisprudence et les auteurs
ont admis que la responsabilité de l'Etat devait être retenue lorsqu'elle
était fondée sur une faute de service. Les officiers de l'état civil
assument un véritable service public et les principes de la responsabilité
pour dommage causé par le fonctionnement défectueux des services publics s'appliquent
à celui de l'état civil (V. en ce
sens, Cass. 1re civ., 28 avril 1981 : D. 1981, 557,
note Massip ; RTD civ. 1982, 148, note Durry
; Gaz. Pal. 1982, 1, pan. jur. 10, note Chabas).
En conséquence, la responsabilité du greffier dépositaire d'un exemplaire des registres de l'état civil est désormais celle dégagée par la jurisprudence administrative et judiciaire ; il répond seulement de sa faute personnelle à condition qu'il s'agisse d'une faute lourde et la preuve de cette faute doit être rapportée (Cass. 1re civ., 28 avril 1981, précité).
En outre, l'état civil relevant du contrôle judiciaire, cette
responsabilité des officiers de l'état civil, de même que celle des
greffiers en chef dépositaires des registres, doit être mise en jeu devant
les juridictions civiles de l'ordre judiciaire et non devant les
tribunaux de l'ordre administratif incompétents en ce domaine (Instr. gén. relative
à l'état civil, n. 25).
II .
– GREFFIERS DES TRIBUNAUX DE COMMERCE
A .
– Introduction
35. – A la suite de la mise
en place de la réforme des greffes opérée par la loi n° 65-1002 du 30 novembre
1965, il n'existe plus qu'une seule catégorie de greffiers titulaires de
leur charge, les greffiers des tribunaux de commerce. Ce sont des officiers
publics et ministériels dont les fonctions consistent à écrire les jugements
ou autres actes émanant des tribunaux ou des juges, à en conserver les minutes
et à en délivrer les copies. Ils sont également chargés de la tenue de certains
registres dont le plus connu est le registre du commerce et des sociétés.
Ils ont la garde des scellés et de toutes sommes déposées au greffe. Ils dressent
les actes de greffe et procèdent aux formalités pour lesquelles compétence
leur est attribuée (COJ, art. R.
821-2).
Les greffiers des tribunaux de commerce, qui peuvent être des personnes physiques ou morales, sont assistés dans l'exercice de leurs fonctions par des commis et des employés qu'ils rémunèrent sur leurs deniers.
36. – En matière disciplinaire, les greffiers des
tribunaux de commerce sont attraits devant le tribunal de grande instance.
Toute personne qui se prétend lésée peut demander des dommages-intérêts
au tribunal saisi disciplinairement (COJ,
art. R. 822-1).
Lorsque le greffier est une société, aux termes de l'article 55 du décret n° 71-688 du 11 août 1971 modifié par le décret n° 91- 742 du 31 juillet 1991, cette société peut faire l'objet de poursuites disciplinaires, mais ce ne peut être indépendamment de celles intentées contre les associés. L'article 53 de ce texte déclarant applicables à la société et aux associés les dispositions des articles L. 822-1 à L. 822-7 et R. 822-1 à R. 822-18 du Code de l'organisation judiciaire, l'action en dommages-intérêts peut également être exercée contre eux par la personne alléguant avoir subi un préjudice du fait de la faute.
37. – L'action en responsabilité civile contre le
greffier du tribunal de commerce est donc soumise, quant à sa forme, à deux
procédures différentes. La victime du dommage peut, pour en obtenir la
réparation, soit intervenir dans la procédure disciplinaire, soit engager
une instance civile en dommages-intérêts selon la procédure de droit commun.
Cependant, elle ne peut prendre l'initiative d'engager la procédure disciplinaire
; elle ne peut qu'intervenir comme partie jointe à l'action engagée à la requête
du procureur de la République (COJ,
art. L. 822- 3 et R. 822-1).
38. – Lorsque le greffier du tribunal de commerce
est une société constituée conformément à la loi n° 90-1258 du 31 décembre
1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales
soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé,
les tribunaux civils sont seuls compétents pour connaître de l'action
en responsabilité (C. com., art.
631-1).
39. – Au fond, l'action en responsabilité civile contre
le greffier du tribunal de commerce obéit aux dispositions des articles 1382
et suivants et 1991 du Code civil.
C'est ainsi que le greffier du tribunal de commerce est
responsable non seulement des fautes ou négligences qu'il commet personnellement
dans l'exercice de ses fonctions (Cf.
infra n. 41 s.) mais
encore des fautes de ses employés ou commis (Nîmes 21 janv. 1864 : S. 64, 2, 19); cependant
les commis peuvent être déclarés responsables des fautes qui leur sont
personnellement imputables (Dijon 22
déc. 1865 : S. 66, 2, 288).
Le greffier est responsable aussi bien envers les
particuliers qu'envers l'Etat de ses erreurs ou fautes
professionnelles (Paris 29 janv. 1947
: D. 1947, 205 ; Gaz. Pal. 1947, 1, 120).
40. – Conformément au droit commun, le greffier qui
a commis une faute ne peut être condamné à des dommages-intérêts que s'il existe un préjudice et s'il
y a une relation de cause à effet entre la faute et le préjudice (Cf. T. civ. Condom 29 juill. 1903 : Gaz.
Trib. 1904, 1, IV, 89).
B .
– Fautes engageant la responsabilité
du greffier
41. – La responsabilité du greffier peut être
engagée, notamment à l'occasion de la rédaction des jugements ou des actes
et procès-verbaux qu'il a la charge d'établir, à l'occasion de la conservation
de pièces, valeurs ou objets dont il a la garde.
1 ° Rédaction des jugements, actes ou procès-verbaux
42. – Le greffier est responsable des fautes
qu'il a pu commettre en transcrivant les jugements qui lui sont remis rédigés
par le juge qui les a rendus (Pau
1er fév. 1897 : D. 98, 2, 121 ; S. 97, 2, 98).
Le greffier a le devoir de transcrire sur minutes les jugements de remise de cause rendus par le juge siégeant à l'audience, de même que les autres jugements, alors notamment qu'ils énoncent les qualités des parties, et contiennent la mention de leur comparution personnelle, des explications contradictoires qu'elles ont données, ainsi que du renvoi du jour où le jugement définitif sera prononcé.
En omettant la transcription sur minute de ce jugement dont l'existence est attestée par le plumitif, il commet une faute, laquelle est particulièrement grave, s'il s'agit d'une affaire sujette à appel et que le juge ait eu le soin de relater les dires et aveux des parties.
Le greffier est également en faute lorsqu'il transcrit le jugement définitif en le modifiant et en supprimant la mention d'un jugement d'instruction qu'il avait omis de transcrire.
La charge de porter sur la minute le jugement rendu incombant exclusivement au greffier, le juge a le droit et le devoir de ne pas signer cette minute si elle n'est pas conforme à la décision rendue et, comme il devient alors impossible à la partie gagnante d'en obtenir une grosse, elle est en droit de demander des dommages-intérêts pour le préjudice que lui cause cette irrégularité, soit au commis-greffier qui tenait l'audience, soit au greffier comme civilement responsable.
Mais pour la détermination des dommages-intérêts les juges doivent tenir compte de ce que le jugement était susceptible d'appel (Pau 1er fév. 1897, précité).
43. – Il est également responsable des erreurs
et des omissions qu'il a pu commettre dans les actes et procès-verbaux
qu'il est chargé d'établir (Cass.
1er sept. 1826 : S. chron. – Cass. 27 mars 1845 : D. 45, 4, 457. – Cass. 28
nov. 1846 : D. 46, 4, 446. – Cass. 8 mai 1891 : D. 91, 5, 156. – Trib.
paix Langres 4 déc. 1936 : Gaz. Pal. 1937, 1, 307).
Doit être condamné aux frais et à l'amende de 500 francs le greffier qui a apposé sa signature en surcharge de celle d'un commis greffier effacée à l'aide d'un grattage, alors surtout que cette surcharge n'a pas été approuvée et entraîne la nullité de l'acte (Cass. 8 mai 1891, précité).
44. – Au contraire, le greffier n'est pas responsable
des erreurs qui ont pu être commises par le magistrat qui a rendu la
décision ou des erreurs commises par les avoués dans la rédaction des
qualités (Cass. req.
13 mai 1850 : D. 50, 1, 320. – Besançon 4 mai 1896 : S. 96, 2, 65. – V. note
Glasson sous Pau 1er fév. 1897, précité : D. 98,
2, 121, note 1, 5).
La rédaction de la minute étant l'oeuvre exclusive du président jusqu'au moment où il appose sa signature, et ensuite celle de la cour, le greffier n'encourt aucune responsabilité lorsqu'un arrêt (ou un jugement) est déclaré nul par suite de la constatation dans la minute d'une mention inexacte relativement au rang des juges entre eux (Besançon 4 mars 1896, précité).
45. – En matière de vente et de nantissement de fonds
de commerce, les greffiers des tribunaux de commerce sont responsables
de l'omission sur leurs registres des inscriptions requises en leur greffe
et du défaut de mention dans leurs états ou certificats d'une ou plusieurs
inscriptions existantes (L. 17 mars 1909, art. 33).Mais ils ne
sont pas responsables si l'erreur provient de désignations insuffisantes qui
ne leur sont pas imputables (L.
17 mars 1909, art. 33 précité et TGI Saint-
Nazaire 13 oct. 1969 : JCP 70GIV, 43. – V. aussi Cass. 3e
civ., 22 mai 1975 : Bull. civ. III, n. 171).
Leur seule obligation est de se reporter à la dénomination
qui leur est donnée et de constater s'il existe ou non des inscriptions de
nantissement (même arrêt).
Il a été jugé que le greffier du tribunal de commerce ne
peut refuser d'inscrire une subrogation en marge de l'inscription d'un
nantissement, dès lors qu'il se trouve en présence d'un acte régulier et complet
dans sa forme extérieure, et son refus constitue une faute dont il doit
réparer les conséquences dommageables (T.
civ. Seine 16 janv. 1933 : Gaz. trib. 1933, 1, II, 291).
46. – Le greffier du tribunal de commerce est tenu, aux termes de l'article 30 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce et des sociétés,sous sa responsabilité, de s'assurer de la régularité de la demande d'inscription d'immatriculation, de modification ou de radiation. « Il vérifie que les énonciations sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires, correspondent aux pièces justificatives et actes déposés en annexe et sont compatibles, dans le cas d'une demande de modification ou de radiation, avec l'état du dossier » (art. 30, al. 2). Il s'agit donc d'une vérification de la forme et non d'un examen de la validité au fond dont le greffier n'est pas juge.
47. – En application des dispositions de l'article 698 du Nouveau Code de procédure civile, les frais de procédure et des actes nuls par l'effet de la faute du greffier restent à sa charge. Il en est de même des frais injustifiés. Le greffier peut, en outre, être condamné à des dommages-intérêts envers la partie qui a subi un préjudice du fait de l'annulation des actes et procédures.
48. – A l'occasion de la perception des émoluments et des frais qui leur sont dus,le décret n° 80-307 du 29 avril 1980 modifié fixant le tarif (notamment les articles 8, 9 et 16) soumet les greffiers des tribunaux de commerce à des obligations dont la méconnaissance les rend passibles de sanctions disciplinaires et par voie de conséquence de condamnation à des dommages- intérêts envers la personne lésée.
2 ° Délivrance des copies ou extraits
49. – Aux termes des articles 1435 et 1440 du Nouveau Code de procédure civile qui leur sont applicables, les greffiers des tribunaux de commerce sont tenus de délivrer, à charge de leurs droits et dans les cas où cette délivrance est autorisée, les copies ou extraits des jugements, actes, registres ou répertoires. Ces textes ne reprennent pas la disposition de l'article 853 de l'ancien Code de procédure civile, auquel ils sont substitués, selon laquelle le refus de délivrer une copie pouvait être sanctionné par une condamnation à des dommages-intérêts ; cependant, il ne fait aucun doute que le refus injustifié et fautif de délivrer une copie peut servir de base à une action en dommages-intérêts en vertu des dispositions de l'article 1382 du Code civil.
Par ailleurs, l'article 139 du Nouveau Code de procédure
civile permet au juge qui ordonne la délivrance de la copie d'un acte détenu
par un tiers d'assortir sa décision d'une peine d'astreinte.
50. – Les greffiers sont, en outre, responsables des
fautes commises dans la délivrance des copies et notamment des erreurs
contenues dans les copies (Paris 29 janv. 1947 : Gaz. Pal. 1947, 1,
120. – V. cependant Cass. req.
24 juin 1863 : D. 63, 1, 397 ; S. 63, 1, 332. – Bordeaux 12 fév. 1874 : D.
75, 5, 381 ; S. 74, 2, 247).
3 ° Conservation des pièces, titres ou objets
51. – Le greffier est responsable des registres,
titres, documents ou objets dont il a la garde.
(Dijon 22 déc. 1865 : D. 66, 2, 39 ; S. 66,
2, 288. – Cayenne 18 déc. 1871 : D. 72, 2, 90).
53. – ... ou de la perte de pièces qui lui
ont été remises par une personne à l'occasion d'un acte de son ministère
(Cass. req. 25 juin 1877 : D. 78, 1, 27 ; S. 78, 1, 118. – Riom 21
fév. 1857 : D. 57, 2, 147).
Il pourrait toutefois être déclaré irresponsable s'il venait à établir que ces titres ont été subrepticement ou violemment enlevés de son greffe (Riom 21 fév. 1857, précité).
54. – Il est également responsable des objets
qui lui ont été confiés (T. civ.
Rodez 6 déc. 1904 : Gaz. Trib. Midi 22 janv. 1905.
– V. cependant T. civ. Condom 29 juill. 1903 : Gaz. Trib.
1904, 1, IV, 89. – T. civ. Nice 10 nov. 1941 : Gaz. Pal. 1942, 1, 50. – Paris
20 janv. 1942 : S. 1942, 2, 25 ; Gaz. Pal. 1942, 1, 104 ; DA 1942, somm. 11).
55. – C'est ainsi qu'en matière de dépôt des dessins
et modèles prévu par la loi du 14 juillet 1909 modifiée, le greffier du
tribunal de commerce qui reçoit les objets procède à leur enregistrement et
les transmet à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI).
Ces opérations donnent lieu à diverses formalités prescrites par le décret du 26 juin 1911 modifié dont les négligences
ou omissions peuvent être le fondement d'une action en responsabilité
dans les conditions du droit commun ; de même en cas de violation du secret
ou de disparition d'un objet déposé.
4 ° Enregistrement des actes et jugements
56. – Le greffier du tribunal de commerce est soumis
aux mêmes obligations que les autres officiers publics et ministériels en
ce qui concerne la formalité de l'enregistrement et la tenue des registres
(CGI, art. 853 et 860). Sont notamment soumis à cette formalité
les décisions de l'ordre judiciaire lorsqu'elles donnent ouverture à un droit
proportionnel ou progressif (ibid.
art. 635); c'est le cas en matière de vente de fonds de commerce
(ibid. art. 719).
Les négligences ou les omissions commises par les greffiers des tribunaux de commerce dans l'accomplissement de leurs obligations en cette matière entraînent, outre les pénalités fiscales édictées par les articles 1835 et 1840 C du Code général des impôts, la possibilité pour les personnes ayant subi un dommage de ce fait d'exercer contre le greffier fautif une action en responsabilité civile selon le droit commun.